NBC, Universal City, California, le 25 juillet
1994. Conférence de presse
en présence de : George Clooney, Michael Crichton, Anthony
Edwards, Eriq Lasalle, Sherry Stringfield, John Wells, Noah Wyle.
QUESTION : Mr Crichton, vous avez
beaucoup de projets dans dautres domaines tels que lécriture
et le cinéma. Quest ce qui vous a amené à la télévision
?
MICHAEL CRICHTON : Ce projet a une longue histoire et je my suis intéressé depuis mes études en médecine. Cela sest passé je crois, en 1989, Steven Spielberg ma appelé et ma dit quil voulait filmer une histoire sur le service des urgences dun hôpital. Je lui ai répondu que moi aussi, jen avais envie. Nous avons commencé à travailler sur ce projet et rapidement après nous nous sommes intéressés aux dinosaures.(Rires).Nous navons cessé de reporter ce projet à plus tard. Puis nous avons pensé que cette idée pouvait prendre une autre forme que celle dun film de cinéma. Et nous sommes très heureux den avoir fait une série télévisée.
QUESTION : Mr Crichton, pouvez-vous nous dire ce que cette série vous apporte personnellement? Vous rappelle-t-elle des souvenirs ? Je ne sais pas jusquoù vous êtes allé dans vos études de médecine. Avez-vous travaillé en tant quinterne par exemple ?
CRICHTON : Non, mais jai un doctorat en médecine. Jai arrêté après lobtention de ce diplôme.
QUESTION : Cette série décrit si bien lenfer que vivent les gens qui travaillent dans ce service. Comment avez-vous pensé à cela ? Avez-vous parlé à dautres médecins, pourquoi ce sujet était-il si important à vos yeux ?
CRICHTON : Et bien, je pense on le retrouve dailleurs dans lépisode pilote que je me suis beaucoup inspiré de mes diverses expériences. Cest intéressant de voir que, bien que la médecine ait beaucoup évolué ces dernières décennies, certaines choses nont absolument pas changé. Je pense notamment, à la composition des médicaments de première urgence et à lattitude des gens lorsquils sont confrontés à la mort.
QUESTION : Avec le système actuel des hôpitaux, les internes travaillent pratiquement 24h/24 et les malades sont soignés par des gens exténués. Pensez-vous que ce système soit à revoir ?
CRICHTON : Cest un système qui existe depuis longtemps. Cest une formation très intense pour les internes. Ils peuvent apprendre beaucoup de choses. Cela fait des années que le problème du personnel manquant sérieusement de sommeil, est posé. Il est vrai que cest dangereux mais cest le système.
QUESTION : Mr Crichton, votre série va-t-elle traiter de thèmes tels que la politique de santé, les réformes.. ? Vous avez lhabitude de parler de problèmes sociaux dans vos livres.
CRICHTON : Je crois que lAmérique entière est concentrée sur ce problème de santé et peut-être que nous navons pas besoin den rajouter. Je pense que la série traite du quotidien dun lieu de travail. Elle montre le monde tel quil est et non tel quil devrait être à lavenir, comme ce que font les politiques.
QUESTION : Dr Crichton, à la télévision, il y a très peu de séries entièrement écrites par un seul auteur. Et ces auteurs nécrivent généralement pas de roman en même temps. Avez-vous lintention de continuer à écrire, seul, les épisodes de URGENCES ou allez-vous peu à peu déléguer et superviser cette tâche ? Quel sera votre rôle ?
CRICHTON : Je pense que je superviserai le plus souvent. Je ne sais pas ce que John Wells dirait de mon rôle jusquà maintenant. Parfois, jai limpression davoir assez de distance, parfois jai le sentiment de le rendre fou. Donc, je ne sais pas ce quil en dirait.
JOHN WELLS : Lorsque nous nous sommes rencontrés la première fois, nous nous sommes mis daccord sur le fait que Michael, malgré son emploi du temps chargé, devait simpliquer dans le scénario et son évolution avec léquipe des scénaristes; ce quil a fait cet été. Il lit tous les scripts, tous les quotidiens. Personnellement, je ne sais pas comment il fait cela. Jai toujours été impressionné par sa capacité de travail et dadaptation, compte tenu de son emploi du temps.
QUESTION : Sherry, pouvez-vous nous parler de votre passage de NYPD Blue à URGENCES ? Il me semble avoir lu dans la presse que vous nétiez satisfaite de votre rôle dans NYPD Blue. cela explique-t-il votre présence dans URGENCES ?
SHERRY STRINGFIELD : Je pense queffectivement, cela a motivé mon choix de jouer dans URGENCES. Vous savez, depuis le début, lhistoire était trop compliquéedans le premier épisode, je divorce de lacteur principal et jétais ladjoint du Procureurcétait difficile de faire évoluer tout ça dans un commissariat. Il y avait toujours plein de problèmes de ce genre. Jai pensé que je devais voir ce qui se passait ailleurs. Et voilà.
QUESTION : John, il semble que beaucoup de ceux qui ont travaillé avec vous sur China Beach, retravaillent avec vous dans cette série. Faites vous un rapprochement entre latmosphère de cet hôpital et les conditions difficiles quont traversées McMurphy et les autres dans China Beach ?
WELLS : Oui, cest lune des premières choses que nous avons découvertes, moi et mon équipe, lorsque nous faisions des recherches pour URGENCES. Les services soignant les blessés, forment leurs médecins dans les services durgences urbains. Cest le seul endroit où lon peut voir des blessés par balles et par armes blanches, le genre de choses auxquelles vous êtes confronté sur un champ de bataille. La façon dont on classe les patients selon la gravité de leur cas au Vietnam est très similaire à celle des services des urgences. Les deux pratiques sont très similaires.
QUESTION : Nest-ce pas du déjà vu pour vous et pour les autres ? Navez-vous pas limpression de retrouver la même atmosphère, mais peut-être avec un regard différent ?
WELLS : Il y a beaucoup de ça. Même si il y a une différence majeure entre un service durgences moderne et une tente plantée au milieu dun champ à Da Nang. Nous avons souvent utilisé les mêmes procédés que dans China Beach, en les améliorant. Nous avons rencontré beaucoup de médecins et dinfirmières des services des urgences. Un médecin et un étudiant en 3ème année de médecine ont été nos conseillers techniques. Une des raisons pour lesquelles la série est réaliste, est que tous nos figurants sont de vrais médecins et infirmières des services des urgences.
QUESTION : Anthony, auriez-vous pensé quun rôle aussi complet et aussi intéressant que le vôtre pouvait se trouver dans une série télévisée ? Ou cela ne vous a-t-il pas surpris ?
ANTHONY EDWARDS : Cela ne ma pas surpris que ce soit une production télévisée, compte tenu de qui la écrite et de qui est derrière cette série. Je nai jamais eu de problème avec la télévision. Jai tourné quelques films. Mais je pense que la télévision est un format très excitant, espérons le, car nous allons tourné 23 heures de film cette année. Cest le sentiment que jai pour cette série.
QUESTION : Peut-on, daprès vous, comparer la structure du pilote au script dun bon film de cinéma ? Car il a certainement été structuré de cette façon. Il y avait un début, un milieu et une fin. Votre personnage encadrait, en quelque sorte, cet épisode.
EDWARDS : Les scripts de la série que jai pu lire ont été bien meilleurs que ceux de la plupart des films que lon ma envoyés. Cela est dû, je pense, au fait quà la télévision, les gens prennent plus de risques quau cinéma. Parce quils nont pas un budget de 40 millions de dollars. Et japprécie cela. En ce qui concerne les personnages, il y a cinq rôles, distincts, très intéressants dans cette série.
QUESTION : Avez-vous lintention de garder un oeil sur ce que fait la série concurrente? Pour vérifier que vous ne faites pas la même chose ou que vous ne traitiez pas des mêmes sujets ?
WELLS : Cest une situation inhabituelle. Ce sont deux séries médicales mais je pense quelles sont très différentes. Jai des amis qui travaillent sur Chicago Hope et je peux les appeler pour connaître les sujets des épisodes. Je ne minquiète pas en ce qui concerne le fait de traiter les mêmes sujets. Je pense que les deux séries sont structurées différemment, elles nont pas le même rythme. Cest très rare quune histoire qui se passe dans un service chirurgical soit la même que celle qui se déroule aux urgences. Chaque épisode de Chicago Hope raconte plusieurs histoires distinctes. Le rythme de URGENCES est différent. Donc, je ne pense pas que les deux séries empiéteront lune sur lautre.
QUESTION : Sherry, vous avez quitté une très bonne série parce que vous nétiez pas satisfaite de lévolution de votre rôle. Et maintenant, vous mettez-vous daccord avec les producteurs, avant daccepter un rôle, afin quil évolue mieux que dans NYPD Blue ?
STRINGFIELD : Non, je le suppose simplement. Il paraît évident quil y a plus de choses à faire dans Urgences.
QUESTION : John Wells, vous disiez, il y a une minute, que les figurants de la salle dopération étaient de vrais employés de services durgences. Comment faites vous cela ? Avez-vous fait des recherches minutieuses sur ces acteurs, qui ils étaient, doù ils venaient ?
WELLS : Bien sûr. Lance Gentile est médecin, conseiller technique sur le pilote et il fait également partie de léquipe des scénaristes de la série. Lance est médecin dans un service des urgences; il travaille à Los Angeles et il nous amène des médecins, infirmières et internes des hôpitaux où il travaille. Ils aiment bien être là; ils viennent passer une journée et se relaient. Cela a été très utile pour le tournage du pilote. Et je pense que la série y gagne en authenticité.
QUESTION : En parlant dauthenticité, Chicago Hope a considérablement plus de détails graphiques sur les opérations que ce qui a pu être vu auparavant. Pouvez-vous parler de vos considérations à ce sujet ?
WELLS : Je pense que les choses ont plus dimpact lorsquon ne les voit pas complètement. Dans China Beach, nous avons mis longtemps à tourner des choses, vraies, qui semblaient fausses à lécran. Je ne sais pas si vous vous êtes déjà assis dans un service des urgences et que vous avez observé. Beaucoup de choses ont lair irréelles. En fait, les choses sont plus fortes lorsque lon sen détache. Faire entendre ce qui émane de ces endroits et montrer les émotions des gens ont beaucoup plus dimpact que montrer aux gens un scalpel couper la peau. Personnellement, si je vois une telle chose dans une série, il y aura obligatoirement un moment où je vais arrêter de regarder la série et me demander comment leffet a été réalisé. Quel que soit le moment où cela se produit, je manquerai laspect émotionnel de lhistoire. Nous avons tourné une ou deux scènes de ce type pour lopération du personnage, Benton. Et lorsque nous avons regardé les rushes, je me suis dit ça, cest une vésicule de porc et ça, du sirop de karo. Alors jai pensé quon allait en rester là.
QUESTION : Mr. Crichton, ressemblez-vous à un de ces personnages? Nourissez-vous vos personnages avec vos expériences propres ?
CRICHTON : Oui, en particulier le personnage de Sherry.[Rires]. On me pose souvent cette question. Je pense que cest le cas pour tous les auteurs; je mimagine dans la peau de tous les personnages. Ils sont aussi tous mes enfants et je les aime également. Du moins pour linstant.[Rires].
QUESTION : Les expériences que vous avez eues au cours de vos études de médecine, par exemple, peuvent se retrouver dans lun de vos personnages.
CRICHTON : Absolument.
QUESTION : Mr Crichton, lorsque vous avez créé ces personnages et ces situations, quaviez-vous à lesprit ? Qessayiez-vous de dire sur la nature du travail des médecins et des infirmières de services des urgences ? Et sur la nature des services des urgences en général ? Vouliez-vous en faire une description particulière ?
CRICHTON : Oui, je pense quil y a eu une longue période où le rôle des médecins a été dénigré de beaucoup de manières. Vous savez, ce dont on entend le plus parler , ce sont des fraudes sur le programme Medicare ou des médecins qui font 10 000 opérations oculaires par minute. Avec tout cela, on oublie que la fonction première de la médecine est de prendre soin des gens. Et il reste des médecins qui exercent leur métier du mieux quils peuvent et qui accomplissent de véritables exploits. Je voulais ainsi remettre les choses à leur place et montrer ces médecins là.
QUESTION : Jaimerais savoir si lun dentre vous a déjà eu loccasion de se rendre dans une salle des urgences. Avez-vous connu des drames de cet ordre dans vos vies ?
GEORGE CLOONEY : Et bien, maintenant, je suis une thérapie, si ça peut aider.[Rires].
EDWARDS : Je me suis rendu au service des urgences dimanche dernier car en jouant au base-ball, jai trébuché sur mon propre pied. [Rires]. Je peux jouer le rôle dun athlète mais je nen suis pas vraiment un.[Rires]. Je me suis fait une entorse et je me suis luxé une épaule. Ayant effectué des recherches pour cette série, je me suis montré gentil et poli envers le personnel médical de cet hôpital. Car je savais que si je ne le faisais pas, ils auraient pris 15 minutes de plus pour me faire une intraveineuse, je souffrais tellement.[Rires]. Cela sest finalement bien terminé.
QUESTION : Dans quel hôpital était-ce ?
EDWARDS : Laccident ? Jai été à lhôpital Santa Monica mais jai fait mes recherches au centre de traumatologie de U.C.L.A., Le Bon Samaritain.
QUESTION : Le service des urgences est un endroit assez frénétique. (Considérant lassistance entière) Est ce que les autres acteurs peuvent répondre ? Quelles sont vos expériences à vous ?
ERIQ LA SALLE : Jai fait des recherches avec Lance Gentile, qui est le conseiller technique de la série. Il travaille aux urgences de Beverly Hills. Mais je nai pas eu dexpérience semblable à Anthony.
STRINGFIELD : Tu nas jamais été dans un service des urgences ?
LA SALLE : Non, jamais. Juste avec des copains. Mais pas pour moi personnellement.
CLOONEY : Tu nas jamais été pris dans cet engrenage ?[Rires].
STRINGFIELD : Oh !
LA SALLE : Ah, cest ça.
STRINGFIELD : Quand jétais enfant, je me cognais toujours le menton sur quelque chose. Et jétais toujours là pour les piqûres. Jen avais une peur bleue. Javais très peur des docteurs.
NOAH WYLE : Ma maman est infirmière en chef en orthopédie à lhôpital Kaiser à Hollywood. Jai donc grandi au sein dun milieu médical et jai passé beaucoup de temps dans cet hôpital. Et je pense en passer encore plus aux urgences avec les amis qui y travaillent.
QUESTION : John, quelle est votre opinion sur lépisode pilote ? Est-ce pour nous un avant-goût dans le ton et le rythme de ce qui va suivre ?
WELLS : Oui, je le
pense. Bien quun des problèmes du tournage dun
pilote sur le milieu médical est de trop sattarder sur la
personnalité de chaque personnage. Les téléspectateurs sidentifient
à des patients. Personnellement, je me mets à la place du type
sur le brancard. Je ne voudrais pas entendre parler des problèmes
de divorce des gens qui soccupent de moi. Dans le pilote il
est important de montrer que les médecins sont bons,
bienveillants, compétents et que leurs patients passent en
premier. Cest donc lun des messages de notre pilote.
Je pense quil est passé. Ceci étant établi, nous avançons
dans la série. Je pense que maintenant nous avons lopportunité
dexplorer la vie privée de nos personnages. Nous
laisserons de côté lhôpital, à loccasion.
Je pense que 75% de laction se déroulera à lhôpital
et 25% à lextérieur. Mais ce ne sera pas appliqué à la
lettre. Il y aura des épisodes qui se passeront la majeure
partie du temps hors de lhôpital et dautres qui se
passeront seulement à lintérieur. Le rythme et le style
de la série seront égaux à ceux du pilote.
QUESTION : Mr Crichton, nous avons parlé, ce matin, au Dr Robin Cook, un ami à vous, qui nous a dit que cétait mauvais de mettre la profession sur un piédestal. Daprès lui, cest la raison pour laquelle il existe de mauvais docteurs. Il a ajouté que les médecins étaient des hommes et tous les médecins nétaient pas égaux et tous les hôpitaux non plus. Il rejette toute divinisation des médecins. Que pensez-vous de ces remarques ? Vous disiez que vous vouliez remettre les choses à leur place. Ne le faites-vous pas un peu trop ?
CRICHTON : Non. Les deux opinions se défendent. Vous savez, au moment de mes études, les médecins, dans lopinion des gens, étaient pratiquement aussi hautement considérés que les juges de la Cour Suprême. Le public leur portait une immense estime, qui, avec le recul, nétait pas justifiée. Et Robin fait partie de cette génération. Cest pourquoi il pense que tout cela, cest trop et que les médecins doivent être humanisés. Les docteurs de cette série sont très humains. Aucun ne fait un gros coup de fric ou essaie de corrompre le système dans cette série. Ce nest pas le sujet de la série et cela ne concerne pas, selon ma propre expérience, les services des urgences.
QUESTION : Mr Crichton, vous semblez vouloir dépeindre ces hommes et ces femmes comme des héros, communs, ordinaires. Et en même temps, ne pensez-vous pas que vous influencez le public dans le mauvais sens, car si les téléspectateurs regardent attentivement la série, ils voient des médecins qui après 21 heures de travail daffilée continuent à examiner les autres patients ? Ou un étudiant de 3ème année, incapable de faire une intraveineuse ? Je serais horrifié à lidée que Noah me fasse une intraveineuse ! [Rires]. Ne donnez-vous pas à la fois une bonne et une mauvaise image ?
CRICHTON : Oui, mais cest
ce qui se passe dans la réalité. Avant Noah, cétait moi.
Le sang giclait du bras du type, car je narrivais pas à
faire une intraveineuse. Des milliers de jeunes médecins ont
fait la même erreur, pendant leurs études. Les hôpitaux sont
très formateurs. Je pense quon rend service aux gens en
leur montrant le monde tel quil est.
QUESTION : Les urgences sont un endroit
frénétique. Comment éviter de basculer dans un mélodrame tout
en gardant léquilibre et le ton des scènes dramatiques de
la série ?
WELLS : Le mélodrame est toujours un problème dans ce genre de situation. Ce que nous essayons de faire, cest de ne pas sattarder sur chaque patient. Vous savez, la série traditionnelle sur les milieux médicaux ne parle pas vraiment des médecins. Les histoires parlent des patients. Ils arrivent au premier acte et disparaissent au dernier, quelque chose leur arrive, puis vous voyez leur famille. On soccupe toujours deux.
Le rôle du médecin est de voir un certain
nombre de patients dans la journée. Et franchement, je ne pense
pas que nous ayons passé assez de temps sur chaque patient pour
que la série bascule dans le mélodrame. Vous allez de scène en
scène, de patient en patient. Et vous suivez le cours de la
journée, avec le regard du docteur. Ainsi nous essayons de préserver
la série de tout sentiment facile.
Nous ne faisons pas dépisode traitant dun sujet précis.
Il ny aura pas dépisode de URGENCES
traitant de leuthanasie ou de la situation de la santé aux États-Unis. Vous vivrez ce que vivent les médecins. Et si vous désirez
en tirer des conclusions, vous le pouvez, mais nous ne prêcherons
pas sur ce que vous devez retenir de ces expériences. Nous vous
montrons ces expériences, cest tout.
QUESTION : Mr. Wells,
du temps de M*A*S*H, je me souviens quil y
avait une loi à respecter; il fallait montrer au moins une scène
où les médecins travaillaient sérieusement. Ils trempaient
dans le sang jusquau coudes. Est-ce que ce sera le cas dans
cette série? A quel moment de la série verra-t-on une scène de
ce type ?
WELLS : Je pense que la difficulté sera
de dire dans chaque épisode, quil y aura au moins une
partie où on les verra parler à dautres personnes quà
des patients. Cela veut dire quils vont passer la plupart
de leur temps avec les patients. Un épisode verra apparaître en
moyenne 30-40 patients.
QUESTION : Mr. Wells, jai remarqué en regardant la série, que le jargon médical semblait être omniprésent, presque comme au temps de Ben Casey. Cette tendance va-t-elle se retrouver dans tous les épisodes ? Ne craignez-vous pas quun excès de vocabulaire technique puisse faire fuire laudience ?
WELLS : Vous savez, si vous essayez dexpliquer tout le jargon médical, le public se sent obligé de le comprendre. Puis vous vous rendez compte que vous passez beaucoup de temps à expliquer du vocabulaire médical complexe au public et il le regarde. Ce que nous espérons, cest que le téléspectateur entende le vocabulaire sans y faire attention. Il ny a aucune chance pour que la majorité des gens sache ce que cest quun CBC, un Chem-7 ou un UA etc. Alors il commencera à sintéresser à ce qui se passe dans la scène. Il fera attention à ce quendure le patient et à ce que font les médecins. Notre souci a toujours été de ne pas perdre de temps à expliquer la complexité dune scène. Nous voulons que le téléspectateur comprenne lémotion que véhicule une scène, ses enjeux et ce que les médecins tentent de faire.
QUESTION : Dr Crichton, pouvez-vous nous parler de ce qui vous a impressionné quand vous aviez lâge de Noah ? Et nous dire pourquoi vous navez pas continué après lobtention de votre diplôme ?
CRICHTON : Et bien, je
crois que cétait vraiment ça. Les gens vivant dans un
stress permanent, la façon dont la vie privée du personnel est
sacrifiée, le fait que ces gens essaient daccomplir
quelque chose de bien, vous voyez. Ils doivent avoir leurs
raisons pour faire cela, ils peuvent aimer les décharges dadrénaline
mais ce nest pas la profession la mieux payée. Cest
un choix quils font par vocation. jaime beaucoup cela.
Jai quitté la médecine pour rendre service à mes
patients. [Rires]. Jétais un horrible docteur. Si on mavait
appelé la nuit parce que le petit Johnny avait une otite, jaurais
répondu : Donnez lui une aspirine et appelez-moi demain.
Et vous savez, vous ne voudriez pas dun médecin irritable
qui, pour une douleur à lestomac due à une crise de foie,
essaiera de savoir de quelle maladie inconnue il sagit. [Rires].
Qui a besoin dun médecin qui invente une nouvelle maladie
rien que pour vous? [Rires].
Je ne me sentais pas à mon aise, jai donc quitté la médecine.
QUESTION : Mr.
Crichton, vos camarades de classe et vos parents ont-ils compris
votre décision? Qua dit votre famille ?
CRICHTON : Ils étaient horrifiés.
Surtout après mon départ pour Los Angeles et mon entrée dans
le show-business. Je vous ai dit tout à lheure quà
cet époque, les médecins étaient presque considérés comme
les juges de la Cour Suprême. Et bien, cétait comme si javais
renoncé à la Cour Suprême, pour devenir un petit fonctionnaire.[Rires].
QUESTION : Le personnel des urgences est sans doute le plus enclin à quitter le métier pour cause de surmenage. Jai un ami qui y travaille depuis sept ans et il est le plus âgé de son service. Si cette série marche et quelle est diffusée pendant des années, comment allez-vous faire pour garder tous ces personnages ensemble, ce qui semble irréaliste pour un service des urgences ?
WELLS : Cest la
difficulté dans une série télévisée. On présente deux
personnages ensemble, qui ne resteraient pas longtemps ensemble
dans la réalité, à lexception des séries dites familiales.
Vous éprouvez exactement les mêmes problèmes avec une série
policière. Les policiers ont un même co-équipier pendant six
ou sept mois, en réalité.
Dans Urgences, nous parlons de la pression que
subissent les médecins. Nous essaierons de trouver des moyens
ingénieux pour garder la même distribution pendant longtemps.
QUESTION : Mr. Crichton, vous avez vécu
une incroyable année et même une année et demi. Vous êtes
passé décrivain à succès à une véritable marque de
qualité, et les gens éditent vos premiers livres écrits sous
un pseudonyme, sous votre vrai nom. Quest-ce que cela a
changé dans votre vie ?
CRICHTON : Ma vie est devenue un enfer. [Rires]. Je ne sais pas quoi répondre. Jai toujours voulu être derrière les caméras, je ne voulais pas être reconnaissable. Et je le suis maintenant. Cela demande beaucoup de travail également.
QUESTION : Cette
question sadresse aux producteurslorsquon se
trouve dans un véritable service des urgences, les relations
avec les patients durent très peu de temps. Les médecins leur
sauvent la vie et les envoient soit chez eux soit dans un autre
service. Alors que dans un autre service médical, on peut développer
la relation avec les patients.
Est-ce que cela vous pose un problème du point de vue du scénario,
que les médecins et les téléspectateurs ne connaissent pas
beaucoup les patients ?
WELLS : Je viens juste de commencer à écrire et je trouve cela libérateur de ne pas devoir écrire une série médicale traditionnelle. Je venais décrire une série médicale lorsque Michael et moi nous nous sommes rencontrés la première fois. Et jai aimé ce projet parce que cest une série de type différent.
QUESTION : Mais pour le téléspectateur, je veux dire
WELLS : Non, non et je
vais en dire un peu plus. Ce qui se passe, cest quen
temps quauteur, on est forcé décrire sur les médecins.
Il ne sagit pas de montrer constamment les malheurs des
malades.
Il sagit dobserver un personnage pendant une longue période,
ce qui est plus difficile. Et cest ce que nous faisons pour
les gens qui travaillent dans les hôpitaux.
Cest plus difficile mais aussi plus intéressant. Cela
renvoie à votre question sur le côté mélodramatique à éviter.
Il est beaucoup plus difficile de faire du mélodrame dans ces
situations parce quil ny a pas de moments mélodramatiques
à jouer.
QUESTION : John, vous
parliez du réalisme de cette situation. La plupart dentre
nous qui avons été confrontés à un service des urgences, nous
navons jamais eu droit à une armada de médecins. Nous
avons connu ces horribles blouses blanches et une salle froide où
nous avons patienté cinq heures avant que quelquun prenne
notre température. Allez-vous en parler dans la série ?
WELLS : Oui, nous en parlerons. Cest
vrai que cest difficile de comprendre quand on attend
pendant cinq heures que son cas ne nécessite peut-être pas une
armada de médecins.
Lorsque lon se place de lautre côté de la barrière,
personne nintervient car tout le monde est occupé à
sauver une vie et vous attendez car vous avez un problème mineur.
Ce que je dis toujours est que si cest votre enfant qui est
dans une ambulance en direction de lhôpital, vous voudriez
bien que cette personne en blouse blanche attende un peu. Ce nest
pas un système où le premier arrivé est le premier servi. Cest
un système où celui qui en a le plus besoin est le premier
soigné. Et particulièrement dans les hôpitaux universitaires
qui tendent à être de véritables hôpitaux urbains et qui
accueillent une interminable vague de gens qui ont besoin dêtre
sauvés. Cest vrai que cest frustrant de se retrouver
assis, gelé dans cette blouse ridicule et regardant la même
infirmière passer toutes les heures. Les gens ne sont pas
absents parce quils font une pause café ou quils
regardent la télévision, cest parce quils sauvent
la vie de quelquun.
QUESTION : En parlerez-vous ?
WELLS : Oui, nous en
parlerons. Car cest limage que se font les gens des
services des urgences.
QUESTION : Vous disiez que vous nalliez
pas traiter de sujets sociaux ou politiques; les urgences sont
devenues symptomatiques de la crise de la santé actuelle dans
notre pays. Elles sont devenues le plan de santé de dernier
recours pour beaucoup de gens pauvres, qui doivent se rendre aux
urgences. Allez-vous parler de ce sujet ?
WELLS : Ce que je voulais dire tout à lheure,
cest que nous en parlons en le montrant. Et vous pouvez en
tirer vos propres conclusions. Je suis toujours préoccupé
lorsquun personnage dit ce quil pense en donnant limpression
de faire un sermon. Si vous êtes daccord avec lui, cest
bien; mais si vous ne lêtes pas, vous navez pas
envie de le revoir. Parce que ce nest pas votre opinion.
QUESTION : Jimagine
que les médecins en parlent et ne se contentent pas de regarder
les vagues de gens qui passent aux urgences.
WELLS : Ils le font quelquefois. En vérité,
chaque fois que jy suis allé, jai remarqué quils
étaient tous tellement sous pression quils navaient
même pas le temps de sasseoir. Pendant les quelque 120
heures que jai passé aux urgences, je ne les ai jamais
entendu parler de cela.
Jai entendu des gens raconter des blagues sur ce sujet.
Vous voyez, de lhumour noir. Mais je nai jamais
entendu personne en parler sérieusement.
QUESTION : Vous traitez de milieux médicaux, vous avez loccasion de parler de thèmes que les chaînes de télévision ont tendance à éviter, tels que lavortement ou le sida. En avez-vous discuté ?
WELLS : Non. Pour
China Beach, je nai jamais eu de problème.
Parce que nous navons jamais fait faire des sermons aux
personnages. Il y a toujours un problème quand on a tendance à
donner son opinion aux gens, alors quils peuvent penser
différemment.
Si vous présentez simplement lévènement et laissez le
public en penser ce quil veut, alors vous rendez vraiment
service. Si vous avez tendance à donner une morale, alors je
pense que vous avez moins dimpact. Un auteur , si il veut
faire passer un message, doit le faire intelligemment.
Et je pense que cest là où se situent les difficultés.
Nous avons réalisé un épisode de China Beach sur
la question de lavortement, ce qui na pas posé de
problème car nous avons montré plusieurs points de vue.
Et je pense que nous verrons de plus en plus de sujets de ce type.
En procédant de cette manière, je pense que nous avons plus dimpact.
Comment les gens sont confrontés au sida, le sida dans les
services des urgences, ce qui est une réalité. Cela en dit plus
sur la question du sida que tout sermon sur le sujet.
QUESTION : George et Eriq, cest
pour vous la deuxième occasion dincarner des médecins. Et
George, il y a dix ans vous jouiez dans une comédie
(E/R
en 1984-85)
CLOONEY : Ce nétait pas supposé être une comédie.
QUESTION : Pouvez-vous comparer les recherches que vous avez effectuées sur les deux séries ? Les trouvez-vous utiles, à présent? Pouvez-vous nous dire celle qui a demandé le plus de recherches?
CLOONEY : Pour moi, cétait différent daller dans les hôpitaux il y a 10 ans. Le monde a beaucoup changé en 10 ans; en 1984, on ne parlait pas encore du sida, et on pouvait visiter les urgences sans problème. Les enjeux, aujourdhui semblent être plus grands, en tous cas dans les hôpitaux urbains comme celui de Beverly Hills.
QUESTION : George,
Anthony et Sherry, vous venez tous les trois de séries à succès?
Pouvez-vous nous expliquer la difficulté ou le traumatisme que lon
éprouve lors du passage dune série à une autre ? Vous,
Sherry vous étiez insatisfaite de NYPD Blue. Quelles
difficultés avez-vous eu avec le producteur ou le studio
?
STRINGFIELD : Il ny a pas eu de véritables
difficultés. Cest ce que je vous ai dit tout à lheure.
Cétait dur de trouver des idées qui allaient avec le
personnage, cest pourquoi ce nétait pas difficile de
partir. Cétait juste un problème et je suis partie. Il ny
a pas eu de scandale. Maintenant je fais partie de cette série
formidable. Cest génial. [Rires].
EDWARDS : On ma entraîné dans Northern Exposure, je pense pour étendre le problème de Joel et Maggie dans la série. Ainsi, ils mont pris pour une année, mont mâché et mont craché. [Rires]. Et heureusement. Cela sest organisé parfaitement pour moi. Sans problème.
CLOONEY : Moi, je faisais des apparitions dans Surs de sang. Jai commencé par tourner quelques épisodes et puis cest devenu plus important. La raison pour laquelle il est difficile de quitter une série, est que tous les gens sont adorables. Mais ici, les gens ne sont pas non plus des minables.
Cette conférence de presse est issue du site de France2